Depuis longtemps, les climatologues tentent d’infléchir les décisions politiques des États après les nombreuses alertes sur la croissance importante, voire exponentielle, des émissions de CO2 responsables en partie du réchauffement de la planète. Le transport aérien en est un des principaux responsables selon ces climatologues. Il produit une quantité importante de CO2, mais également d’autres substances toxiques pour notre environnement. L’esprit de la Convention citoyenne pour le climat dont les « travaux » ont été présentés au chef de l’État en juillet est dans cette droite ligne, animée par des experts convaincus qu’il faut en finir avec l’avion. Pas étonnant donc que les propositions de ce grand symposium soient résolument « anti aérien ». Elles ont de quoi glacer le sang de tous qui vivent par et pour l’aérien (un secteur qui emploie environ 500 000 personnes dont 100 000 emplois directs dans le secteur marchand, quand même…). Le plus inquiétant pour ce secteur est bien que le président Emmanuel Macron soit en accord avec ces conclusions au point qu’un groupe de députés de la République en Marche prépare un projet de loi reprenant tout ou partie des conclusions de la Convention. Leur application à la lettre mettrait un sérieux coup de frein à l’aérien avec un risque majeur de « surcrise » après celle de la COVID. Tout est écrit noir sur blanc. Les professionnels de l’aérien se sont déjà parlé en réunion de crise. Ils devraient prochainement s’entretenir avec les partisans du projet de loi et surtout ils préparent leur réponse.
La première proposition (SD-E1) est d’accroître très fortement l’écocontribution kilométrique perçue sur les billets d’avion. Elle passe de 1,5 euro pour un vol intérieur ou intra européen à 30 euros pour un vol de moins de 2000 km et à 60 euros au-delà… Respectivement 45 et 90 fois plus… Les passagers en classe affaire devront payer pour la première catégorie 180 euros de plus et 400 pour la seconde. L’effet le plus dissuasif concernera le vol en jet privé avec 360 euros de plus pour le billet en deçà des 2000 km et 1200 au-delà. La convention a décidé d’appliquer le tarif fort considérant que l’exonération dont bénéficiait le kérosène atténuait beaucoup l’effet dissuasif des précédents tarifs. Cette mesure chiffrée se monte à plus de 4 milliards d’euros… De plus, elle aurait pour conséquence selon les experts de l’aérien le licenciement de plusieurs milliers de personnes, entre 120 et 150 000 emplois.
Seconde mesure : la fin du transport aérien sur les vols intérieurs si existe une alternative bas carbone satisfaisante en prix et en temps, avec comme limite moins de 4 heures. Cette mesure s’applique déjà aux fonctionnaires depuis un conseil de Défense écologique de février. Si les parlementaires devaient adopter cette option, la convention reconnaît qu’il faudrait accompagner l’ensemble de la filière en organisant des transferts par le train des passagers vers les aéroports internationaux. La convention présuppose que la croissance des vols internationaux compensera la disparition des vols nationaux sans réduction « trop » importante des emplois… Dans la foulée, ajoutons l’interdiction de construire de nouveaux aéroports, mais également l’interdiction d’en agrandir. Les « experts » ont pris comme exemple l’interdiction d’une troisième piste à Heathrow sous prétexte de non prise en compte des engagements climatiques du Royaume uni.
Enfin, l’aviation de loisir qui se confond souvent avec le terme d’aviation générale ne présenterait, selon la convention aucune utilité directe pour la société… On mesure ici la conséquence d’avoir totalement écarté (exclu) des professionnels de l’aérien lors des débats de la convention. Ces « experts » ne pouvaient, peut-être, pas savoir combien cette aviation de loisir est si importante pour le transport et la construction. Nous ne cessons de l’écrire, en dehors de toute posture idéologique : sans aviation générale, pas de pilotes dans les avions de ligne, pas de pilotes en travail aérien, pas de pilotes militaires, pas d’ingénieurs aéronautiques, etc. La plupart s’engagent dans ces voies, car ils ont commencé à voler en club avant d’envisager d’en faire une carrière. On sait pertinemment que pas mal d’ingénieurs sont pilotes privés notamment pour appréhender la troisième dimension et la rigueur qu’elle exige.
On pourrait également évoquer tout l’éco système de salariés qui travaillent dans ce secteur… Au passage, la convention propose d’augmenter la taxation des carburants de l’aviation de loisir (AVGAS). L’aspect le plus étonnant de cette « transition » de l’aérien est le timing souhaité pour cette feuille de route. Tout est calibré au pas de charge, sans ouvrir la porte à des solutions qui vont dans le sens de la réduction des émissions. À titre d’exemple, on pourrait prendre en compte que les vols en turbopropulseurs sont beaucoup plus économes que les vols en jet pour une perte de temps minime. ATR estime que ses avions consomment 40% de moins que les jets. Une compagnie suédoise Braathen Regional Airline a fait voler un ATR lors « d’un vol parfait » entre Halmstadt et Stockholm en optimisant le pilotage et les trajectoires, mais en utilisant également du bio carburant. Ce dernier a la vertu de produire 80% d’émissions de CO2 en moins qu’un carburant classique. Ce vol a permis de réduire de 46 % les émissions par rapport à un vol normal. Des solutions existent pour le court et moyen courrier. Il faut orienter la recherche. Il est surprenant d’ailleurs que le soutien à la R&D vers des technologies plus propres n’apparaisse qu’à la 7e place des propositions de la convention. Les professionnels sont inquiets ; ils espèrent faire entendre raison aux parlementaires.