Il y a des moments heureux, où les yeux brillent, lorsque le cercle de famille réuni voit paraître l’enfant. Était-ce du fait de l’atmosphère heureuse le soir du 17 décembre à Bordeaux, dans le hangar Lindbergh transformé en « Petit Versailles » où Dassault Aviation recevait la famille aéronautique ? Je ne le sais mais je me suis soudain remémoré les premiers vers d’un poème oublié. Cet enfant n’avait rien à voir avec celui de Victor Hugo*, il n’était ni innocent, ni joyeux, mais simplement gracieux : il s’agissait du Falcon 8X dont l’apparition nous a émerveillés et que nous avons applaudi sans retenue quand il a roulé lentement vers nous, nous emportant dans un souffle d’émotion.
Ce soir-là, nous avons parlé librement, de tout bien sûr, puisque nous étions en famille… Du prix d’une turbine PT-6 avec le directeur de Pratt et Witney Canada ; de l’art de vendre un Falcon avec le meilleur vendeur des États-Unis ; des éventuelles futures toilettes du TBM 900 avec un responsable de Daher-Socata ; de la manière de bien dépenser son argent dans les avions d’affaires avec un jeune Qatari… Et, bien sûr, de l’Armée de l’Air et de ses ZRT qui gênent fortement notre activité !
Coïncidence, notre ami Claude Lelaie, l’ancien directeur des EV d’Airbus, avait été reçu le matin même — après deux ans d’attente, s’il-vous-plait — pour en discuter. Je vous laisse juge de ses impressions : « Nous n’avons guère avancé. Si j’ai reconnu la nécessité pour les Armées de s’entraîner, les Militaires ont refusé, quant à eux, de reconnaître la gêne causée. Ils considèrent ces « perturbations » comme de simples aléas. De plus, ils ne comptabilisent que les utilisations réelles des zones, et non pas les utilisations prévues qui nous empêchent de planifier des déplacements. En fait, ils nous considèrent tous comme des amateurs alors que beaucoup d’entre nous utilisent leur avion comme leur voiture et que ce n’est pas en libérant les zones les week-ends et jours fériés que nous pouvons tenir nos rendez-vous. Quant au principe d’un couloir aérien pour éviter d’isoler Ussel et Egletons pendant l’activité de la Zone Centre, c’est un refus total ! L’argument des Armées est qu’à Ussel et Egletons, tout le monde se satisfait de la situation, mais ce n’est pourtant pas ce qui nous a été rapporté par les usagers. »
Bien que Claude soit un vrai guerrier lui aussi, il est sorti de cette réunion plutôt déconcerté : « Que faire maintenant ? Espérer progresser à la prochaine réunion ? » Dans deux ans, Claude ?
Compassion générale autour de moi, d’autant que tout le monde chez Dassault connaît à la fois Claude Lelaie et ses combats pour l’aviation générale. Puis quelqu’un a lancé cette réflexion : « Ce qui vous arrive est normal car, pour un militaire, négocier, c’est capituler ! »
En entendant ces mots frappés au coin du bon sens, j’ai entraperçu une solution à nos problèmes : il fallait peut-être rappeler aux Militaires que nous partageons les mêmes valeurs, la même passion, le même enthousiasme, les mêmes risques et le même ciel. Élargissons tout simplement le cercle de famille !
Notre rédaction vous souhaite une excellente année 2015 !
P.-S. : Tout le monde ne pouvait être à Mérignac le 17 décembre au soir mais nous savons que beaucoup auraient aimé y être, non seulement pour baptiser le 8X, mais aussi pour refaire le monde. Si c’est votre cas, sachez que vous pouvez rejoindre notre équipe et quelques « pointures » de l’aéronautique — à condition de nous prévenir à l’avance — à l’Aéro-Club de France, à Paris, le samedi 10 janvier à 14 heures pour décider des grandes orientations de 2015. Inscription obligatoire sur info@aopa.fr
*NDLR : Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille applaudit à grands cris, etc.