Dans mon enfance, il n’y avait pas de salon des métiers, pas d’Internet, pas de RS, très peu de prosélytisme, juste des magazines en noir et blanc sans photos qui vous fasse rêver, je ne connaissais du pilotage que les récits de pilote de guerre de Pierre Clostermann ou de René Mouchotte et ceux de Saint-Exupéry. Aussi, la vocation pour l’aérien se transmettait de père en fils, il était donc normal qu’un fils de pilote ou de mécanicien à Air France devienne pilote ou mécanicien à Air France.
Voilà pourquoi nous avons imaginé, il y a plus de trente ans, une rencontre entre quelques formateurs et des lecteurs intéressés par le métier de pilote, devenue, au fil des ans, le Salon des formations et métiers aéronautiques (SFMA), un rendez-vous annuel entre « sachants et cherchants », entre professionnels de l’aéronautique dans son ensemble et étudiants, voire écoliers.
Un événement que nous avons toujours souhaité gratuit pour les visiteurs, en partant du principe qu’un droit d’entrée serait dissuasif pour certains et, comme l’a écrit très justement Saint-Ex, dès lors qu’un jeune ne réalise pas son potentiel, c’est Mozart qu’on assassine.
Cette gratuité est rendue possible grâce à la bonne volonté de notre partenaire, le musée de l’Air et de l’Espace (MAE), qui nous accueille dans son hall Concorde, un espace bien cosy malgré des températures extérieures toujours négatives, partage avec nous les coûts de son chauffage par le biais d’un carburant vert et cher, écologie oblige, et rend donc l’entrée du musée gratuite.
Grâce au Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS), à nos exposants, à nos talentueux conférenciers et intervenants – tous devenus de vrais amis –, et maintenant aux recruteurs de la profession, ce salon ne cesse de prendre de l’importance, jusqu’à accueillir 16 000 jeunes ce premier week-end de février. Le record a donc été battu une fois encore, et je me réjouis de voir que les détracteurs de l’aérien n’ont pas eu gain de cause auprès de nos enfants qui ont bien assimilé que cette aviation, si décriée ces dernières années, mais tellement indispensable à la marche du monde, était vertueuse dans ses efforts de décarbonation, au point d’être un modèle de vertu s’ils la comparent aux autres secteurs industriels ou tertiaires.
Avec le SFMA, nous avons sifflé la fin des privilèges, chaque jeune y apprend qu’il a sa place dans l’aérien, qu’il pourra avoir le métier de passion qu’il ne pouvait imaginer seul. Car l’aérien, ce ne sont pas simplement des pilotes de ligne, des pilotes de nos Forces armées, des stewards et hôtesses de l’air, des mécaniciens et agents de piste, mais aussi bien d’autres métiers extrêmement divers, depuis la conception et la fabrication des avions et des systèmes spatiaux jusqu’à la cybersécurité et la décarbonation : ingénieurs, contrôleurs, analystes, formateurs, gestionnaires de projet, experts, etc.
Un vrai problème demeure cependant, il s’agit des stages en entreprise. Si, tout comme Frédéric Parisot, délégué général du GIFAS et partenaire du SFMA, nous nous réjouissons de ce public nombreux qui génère de multiples candidatures pour les centres de formation et les quelque 500 entreprises membres du GIFAS – constructeurs, systémiers, équipementiers et sous-traitants de toutes tailles, notamment pour des parcours en alternance –, nous déplorons que celles-ci répondent par un « non » de principe aux élèves de seconde qui sont à la recherche de leur stage d’observation en entreprise de la fin juin : « Trop compliqué, trop chronophage, trop coûteux… »
Alors que nous pensions avoir aboli les privilèges, nous voilà aujourd’hui obligés de décrocher nos téléphones pour éviter aux jeunes qui, comme Lylou, PNC en devenir qui a osé nous aborder pendant le salon, de devoir accepter un stage de cariste chez Leclerc ou Intermarché… Ne voyez-vous pas là une régression ? Entrepreneurs, faites un petit effort !
Pour finir, sachez que nous avons été parasités plus que d’habitude, notamment avec une cyberattaque d’ampleur du site Internet du SFMA, attaque lancée la veille de l’ouverture dans le but d’empêcher les visiteurs de télécharger le guide du salon, un document dématérialisé pour des raisons écologiques. Par chance, Philippe Desplats, le patron de DIRUPT qui gère notre activité Internet, était à l’affût, il a paré l’attaque, le temps de faire migrer dans la nuit le site sur une plateforme aussi sécurisée que celle de la Banque de France. Philippe en a déduit que « nous avions un ennemi très déterminé ! », je pense plutôt à un militant aussi coloré qu’une feuille d’épinard, vert de rage devant le succès du SFMA, mais qui finira bien par aimer les avions autant que nous autres !
Jacques CALLIES