Dans le domaine du transport aérien, au sein de son projet de loi de finance pour 2024, le gouvernement n’a pas retenu l’augmentation de la taxe sur les billets d’avion, dite taxe Chirac. Une solution que Clément Beaune, le ministre délégué auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires chargé des Transports, porte depuis des mois. C’est une bonne nouvelle pour le secteur. Les acteurs du transport aérien ont peut-être été entendus… Toutefois, le principe « pollueur payeur » n’est, lui, pas abandonné pour autant et l’aérien « qui pollue » va contribuer à financer les modes de transports qui ne polluent pas, essentiellement le ferroviaire dont le réseau doit être modernisé pour continuer à fonctionner à l’instant, mais également en regard pour les divers projets que le gouvernement prévoit pour le fer.
À la place de la taxe sur les billets, sera instaurée une taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance. Elle touchera les grands aéroports français : ADP, Nice, Marseille, Lyon. Les petits aéroports devraient être épargnés : la loi fixe un seuil minimum de prélèvement à 120 millions d’euros pour les résultats d’exploitation et dont la rentabilité moyenne est de l’ordre de 10 %. Cette taxe devrait rapporter 600 millions d’euros. La profession, très réfractaire à toute forme de taxes supplémentaires, est vent debout contre cette taxe sur les infrastructures. À l’occasion d’une conférence de presse, Clément Beaune a naturellement rappelé, une fois encore, que les transports les plus polluants devaient payer pour les autres. Concernant la taxe sur les billets d’avion, il a aussi précisé que l’État n’avait pas vocation à « créer des taxes dans tous les sens » et qu’elle aurait (la taxe de solidarité) fait double emploi avec la taxe sur les aéroports…
Au sein de l’UAF, on condamne cette taxe qui, selon Thomas Juin de l’Union des aéroports, va freiner les investissements des aéroports en matière d’équipement et de décarbonation et que cette nouvelle taxe est en « totale contradiction avec les objectifs de la décarbonation fixés collectivement dans la feuille de route de transition écologique ». Pour le dirigeant, l’UAF se réserve la possibilité d’un recours juridique contre l’État. Sur la question, le ministre est inflexible et rappelle que l’État a beaucoup fait pour l’aérien en soutenant les compagnies, en investissant dans la recherche pour l’avion vert. 300 millions d’euros par an sont donc prévus à cette fin dans le budget, et ce, jusqu’à la fin de la décennie, actant les annones du président de la République lors du salon du Bourget en juin. Il a aussi rappelé que le budget des lignes d’aménagement du territoire (LAT) était de 25 millions d’euros, ce qui fait dire au ministre que l’État n’est pas contre l’aérien.
Anne Rigail, la directrice générale d’Air France, avait même réagi jeudi 28 septembre sur RTL estimant que cette taxe n’était pas une bonne nouvelle et qu’elle allait accentuer une forme de concurrence déloyale entre les compagnies qui opèrent sur les grandes plateformes et celles partant des aéroports régionaux. Elle citait l’exemple de Ryanair à Beauvais, exclu de la taxe sur les infrastructures. Réponse du ministre : on ne va pas taxer les petites plateformes de province qui ont besoin de leurs ressources pour assurer le désenclavement du territoire. Anne Rigail craint, en effet, que cette taxe provoque une hausse des billets d’avion, ADP ayant annoncé qu’il allait répercuter la hausse dans ses tarifs applicables aux compagnies.
La Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (FNAM) s’oppose également à cette taxe qui n’a fait l’objet d’aucune concertation, un dialogue avec les professionnels aurait, selon la fédération, permis d’expliciter les conséquences sur le transport aérien, à savoir un coût supporté par les compagnies et leurs passagers. La fédération demande donc que le projet de taxation supplémentaire des concessions aéroportuaires soit abandonné, faute de quoi, elle étudiera les recours juridiques envisageables contre sa mise en œuvre. Enfin, le Syndicat des compagnies aériennes autonomes (SCARA) se félicite de l’abandon de l’augmentation de la taxe de solidarité sur le transport aérien destinée à financer la restructuration des infrastructures ferroviaires. Il déplore « un tour de passe-passe qui conduit ces aéroports, comme l’annonce d’ores et déjà Aéroports de Paris, à reporter cette taxe sur les tarifs des redevances aéroportuaires payées par les compagnies aériennes clientes, contrairement à la volonté prétendue du gouvernement de ne pas alourdir leurs charges déjà exorbitantes en matière de fiscalité verte. » Tous déplorent que cette taxe punitive soit affectée au transport ferroviaire et non pas à la décarbonation de l’aérien.