Le 5 avril dernier, les membres du Groupement des industriels et professionnels de l’aviation générale (GIPAG) ont été conviés à leur assemblée générale ordinaire à Orly. J’y étais, assis au fond de la salle, en tant que simple adhérent du Groupement pour la première fois depuis des décennies car j’ai abandonné volontairement mon poste d’administrateur, me sentant frappé par la limite d’âge. J’ai trouvé cette position assez confortable car elle permet – si cela s’avère nécessaire – de s’exprimer librement, sans pour autant mettre à mal la réputation du bureau et, par-là, du Groupement.
Car c’est une affaire sérieuse que cette assemblée générale, du moins dans son principe, comme en témoignait l’ordre du jour de cette année que je vous livre : la future réglementation ULM, la présentation de l’ACNUSA (Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires) et de son fonctionnement, la problématique des documents libératoires des pièces détachées, le délai d’exécution des MB 303 (inspections simplifiées réalisées en piste) et le retour responsabilités, l’inflation des coûts d’intervention contrôle documentaire OSAC, l’intégration d’un expert GIPAG dans la Commission des agréments, les problématiques des créneaux et, enfin, la formation de nouveaux contrôleurs de la circulation aérienne.
Le tout a été emballé en une après-midi, en présence des autorités concernées qui ont la parole évidemment et qui préparent leur intervention : je vous laisse donc imaginer ce qui peut bien résulter des quelques brefs échanges possibles. D’un côté, il y a les représentants du pouvoir et, de l’autre, ceux qui obéissent, enthousiastes de l’aérien qui ont sentiment d’être mal-aimés à force de ne pas être entendus. Cela ressemble, disons, à un combat de gladiateurs de la Rome antique dont l’issue était généralement connue d’avance.
Mais cela reste intéressant, comme cette année où quelqu’un a eu l’idée magistrale d’inviter l’ACNUSA, organisme redouté aussi bien par les compagnies aériennes, les aéroclubs, les instructeurs que les simples particuliers comme vous et moi. Elle a donc envoyé au combat, pour la première fois et probablement la dernière, un mirmillon protégé d’un PowerPoint – justifiant les condamnations passées et à venir pour nuisances sonores – et de son statut de membre permanent du collège. Nommé pour son expertise en tant que pilote de ligne retraité d’une grande compagnie, il s’est retrouvé attaqué par trois rétiaires virevoltants, dont deux avocats connus de l’institution en question, et de moi-même qui recueille régulièrement votre désespoir quand vous estimez que vos droits à sortir de trajectoire pour des questions de sécurité ou à l’erreur ont été bafoués.
Eh bien, les Amis, sachez que l’art du pilotage fait partie du passé, le temps des artistes est fini, seuls les gestionnaires seront acceptés désormais… Et tout juste.
Notre PL retraité nous a aussi appris que les décisions se prennent sur dossier et qu’il ne peut donc pas y avoir de débat contradictoire lors des audiences. Mais que le collège sait faire preuve de mansuétude lorsqu’il condamne un aéroclub à 30 000 euros d’amende au lieu de 40 000 pour trois tours de piste effectués après le couvre-feu « car une association sans but lucratif a moins de moyens qu’une compagnie aérienne ». Un vrai cauchemar ! Rendons donc grâce à notre DGAC qui, certes, peut être impitoyable quand il le faut, mais fait toujours preuve de bon sens et d’humanité lors de ses commissions de discipline, comme cela nous est rapporté.
Dès l’ouverture des travaux, en fait, quelqu’un s’était plaint : « L’aviation est devenue politiquement incorrecte ! » Et de le démontrer en racontant un refus du Crédit Lyonnais de financer un avion-école « officiellement », mais non pas officieusement, heureusement.
Ce n’est pas nouveau, et cela ne va pas s’arranger comme par miracle. J’en veux pour preuve une conversation récente avec une « bobo » de ma famille, bardée de diplômes, intelligente, à laquelle je racontais un tweet de Greta Thunberg daté de juin 2018 annonçant la fin de l’humanité dans les cinq ans – aïe, c’est bientôt ! – si on continuait à utiliser des carburants fossiles, ainsi que sa coûteuse traversée écolo vers New York : « Je sais bien que tu ne l’aimes pas et pourquoi. Mais il faut se ficher des détails, on est dans le symbole avec cette fille, le reste ne compte pas ! »
Le plus dérangeant est que cette respectable grand-mère a basé le voilier familial en Grèce, où un généreux soleil permet de « recharger les batteries avec des panneaux photovoltaïques, et donc de naviguer en toute autonomie ». Ce qui signifie forcément qu’enfants, petits-enfants et amis prennent l’avion de ligne chaque année sans se poser de questions existentielles.
Il y a un problème de fond, c’est certain !
Jacques CALLIES