Après plus de dix-huit mois de pandémie, à longer nos quatre murs de manière répétitive, nous avons enfin pu assister à un événement aéronautique et briser la nécessaire quarantaine sociale.
Perdurer malgré tout
Quelque fois décrié par le passé, France Air Expo est le dernier salon public d’aviation générale qui existe en France ; le salon de Blois se concentrant sur les ULM. Et s’il perdure, ce n’est dû qu’à l’opiniâtreté de son organisateur, Didier Mary. Cannois d’origine, Didier a entrepris l’organisation de ce salon lorsqu’il y avait encore de la concurrence active, comme le salon de Lyon. Il faut dire que, dès 2007, année de la première édition, l’idée de passer quelques jours sur la côte d’Azur inondée de soleil plaisait à tous et apparaissait comme un rendez-vous immanquable pour nombre de visiteurs potentiels, mais aussi et surtout pour nombre d‘exposants. Petit à petit, le salon a fait « son trou » et est devenu un rendez-vous annuel ancré dans les habitudes de chacun.
La recette était simple : rassembler tous les exposants dans un lieu unique et présenter tout ce que l’aviation générale avait à offrir. Dès les premières années, les ULM côtoyaient les derniers-nés d’Embraer, Dassault et Daher (Socata à l’époque). Un succès remarquable pour un salon bon enfant. Didier n’oublie d’ailleurs jamais que la jeunesse représente notre avenir et s’investit dans le soutien des remises de diplômes BIA et l’accueil des jeunes passionnés.
Comme souvent, les années se suivent et ne ressemblent pas. L’aéroport de Cannes se fait tirer l’oreille pour offrir un réel partenariat, empilant les contraintes logistiques et sécuritaires les unes au-dessus des autres. Le nombre d’avions visiteurs se voit être limité. Le salon déménage donc pour Pontoise et Lyon, en alternance. Mais, là aussi, les contraintes d’organisation sont telles que le salon peine à rassembler suffisamment de visiteurs pour satisfaire les exposants, lorsque ce n’est pas la météo qui joue des tours. Malgré les critiques qui fusent, Didier et son équipe se remettent au travail pour arriver, coûte que coûte, à organiser un salon d’aviation générale en pleine épidémie de COVID. Une vraie gageure !
Nous voilà donc sur l’aéroport de Lyon-Bron, le 17 juin 2021, impatients de retrouver tous les habitués de ce rendez-vous normalement annuel. Une question reste cependant présente dans la tête des exposants : les visiteurs seront-ils au rendez-vous ?
Un vrai succès pour un salon « COVID »
France Air Expo a connu un vrai succès cette année. Il est mesurable à l’aune du sourire des exposants, dont certains étaient venus un peu à reculons. Pour une fois, tous sont d’accord, nous avons un salon d’aviation générale qui attire pilotes et passionnés. Des avions ont été vendus sur place, à des clients inconnus jusqu’à leur passage sur le salon, et des contacts ont été engrangés, permettant de signer d’autres affaires dans le futur. Et le miracle s’est produit. Le lendemain de l’annonce d’un relâchement des mesures de lutte contre l’épidémie par notre Premier ministre, les visiteurs se sont présentés nombreux à l’entrée.
On a même retrouvé l’ambiance des grandes années, puisque certains constructeurs ont décidé du lancement de nouveaux modèles sur place. Tecnam a ainsi présenté pour la première fois son P2010 équipé du moteur Continental CD-170. Cette machine pourrait être qualifié de 172 moderne et performant, le bloc moteur permettant d’atteindre des vitesses de croisière réelles inconnues du Cessna 172, le tout en brûlant quelques misérables litres de Jet-A1. Le modernisme de la machine est accentué par la présence du Garmin G1000 dans sa dernière version, du pilote automatique (en option) GFC 700 et d’un niveau de confort exceptionnel. Le tout à un prix qui semble raisonnable lorsqu’il est comparé au tarif « livré en France » d’un C172.
Les ULM G1 étaient aussi présents, une première souligne l’organisateur. Le G1 a attiré de nombreux visiteurs qui étaient intéressés par des machines échappant à la lourde réglementation avion et qui permettent de se poser en quelques mètres sur les altisurfaces ou sur les centaines de pistes ULM qui existent dans l’Hexagone. Une première participation qui devrait se renouveler dans l’avenir selon les membres de l’équipe du constructeur.
Tous les corps de métiers de l’aviation générale étaient présents ou représentés par leurs distributeurs. Et c’est sans doute ce qui rend ce salon si attachant. Que l’on soit à la recherche d’un cuve à essence mobile, d’une nouvelle servante à outils, d’un avion, d’un ULM, d’un sellier aéronautique ou de produits de nettoyage, les visiteurs ont tout sous la main et ils peuvent procéder facilement à des comparatifs.
Un point noir scandaleux
Un salon aéronautique organisé sur un aéroport international et douanier, ouvert à la circulation aérienne publique pourrait espérer attirer nombre de pilotes motivés par la perspective de venir assister à l’événement en avion léger. Sa localisation leur permettant de ne pas être à plus deux heures de vol, les encourageant ainsi à allier leur passion avec le moyen de locomotion le plus rapide pour leur permettre une visite.
C’était sans compter l’inébranlable volonté de certains à ne pas se fatiguer ou plutôt à ne pas changer leurs habitudes. Nous avons été stupéfaits lors de la lecture du NOTAM couvrant la semaine dans laquelle s’inscrivaient le montage et le déroulement du salon. Les points saillants étant que l’aéroport était réservé au VFR basés uniquement, et que seuls les IFR de plus de 3,5 tonnes étaient autorisés à atterrir, moyennant une facture de handling obligatoire, mais néanmoins illégale.
Autrement dit, les services concernés ont purement et simplement fermé un aéroport international douanier à presque tout trafic aérien. On peut même dire que cette mesure visait clairement à empêcher les visiteurs du salon à venir par la voie aérienne, au prétexte qu’aucune solution ne pouvait être trouvée pour réguler les arrivées et les départs et que l’aéroport ne pouvait trouver de solutions pour parquer les avions…
Inutile de dire que cela a privé le salon de centaines de visiteurs. Et c’est scandaleux. Comment croire qu’un aéroport de cette taille, qui expose dans tous les salons d’aviation d’affaires et générale en se présentant comme la pépite des Alpes pour l’aviation, ne soit pas capable d’absorber le trafic généré par ce salon ? Un système de réservation de créneaux VFR et IFR est disponible, pourquoi ne pas l’utiliser, ce qui permettrait de prévoir le nombre de contrôleurs nécessaire. Quant au parking impossible, tous les visiteurs ont pu constater que des centaines de mètres de gazon étaient désespérément vides et auraient pu servir. Plusieurs associations de pilotes avion et ULM, l‘AOPA en tête, ont d’ailleurs décidé d’interpeller la DGAC, par l’entremise de la MALGH, sur le sujet.
Malgré ce point noir bien visible, France Air Expo a été un succès et tout le monde s’en félicite. Car sans salon d’aviation générale en France, comment dynamiser le secteur et motiver les pilotes ?