Ces jours derniers, figurez-vous que nous avons rencontré des gens heureux. Eh oui, comme par magie, les planètes se sont alignées pile au moment où je commençais à réfléchir à la manière d’écrire un billet positif à l’approche des vacances d’été, ce qui est habituellement une formalité.
Techniquement, l’été était là depuis trois semaines. Mais il n’avait rien de comparable à cette saison pleine de promesses, de soleil et de ciel azuréen permettant de voler tous azimuts jusqu’à point d’heure. La réalité était toute autre, le ciel restait des plus incertains, bien plus que d’habitude, avec son lot de nuages et de précipitations associés à la circulation de dépressions balayant la France et l’Europe. À quand l’arrivée des beaux jours, au propre comme au figuré ?
C’est à Vichy, dans l’Allier, que nous avons rencontré en premier lieu des gens heureux, à l’occasion de l’essai du Bonanza vintage de ce mois-ci. Nous y avons reçu un accueil particulièrement chaleureux des pilotes de l’aéro-club, élèves, instructeurs et lecteurs de la revue, dont l’un a même rappelé nous avoir fait essayer son Piper M350 il y a quelques années. Merci encore ! Et, pour clôturer cette belle journée, nous y avons croisé sur un parking notre ami avocat, le très respectable Patrick de la Grange, au chevet de son autogire, une clé de 12 en main : jubilatoire !
C’est ensuite à France Air Expo, sur l’aéroport de Lyon-Bron, que le prodige s’est reproduit. Après un paisible vol VFR à l’arrière d’un PA-28 piloté par Patrick Charrier et Gérard Fohlen-Weill où, entre parenthèses, j’ai beaucoup appris sur le management des facteurs humains en observant la coopération harmonieuse et efficace de mon équipage, nous y avons retrouvé des tas d’exposants et amis heureux de partager leur passion immodérée pour la chose aéronautique.
Et c’est enfin à Rochefort, proche de l’île d’Oléron, sur la base aérienne 721, que j’ai rencontré Denis Carraire et Guillaume Ducel, deux pilotes agenais copropriétaires d’un Robin DR-250 de 1965, le quadriplace de grand tourisme dérivé du Sicile-Record. Comme quelques autres, Denis et Guillaume étaient là pour participer à l’esCAPade 2024, un rallye entre Rochefort et Mimizan, organisé sur une journée par notre ami Philippe Favarel, l’inventif président du Cercle Aéronautique du Parlement, afin de mettre en valeur l’une des 12 sections du CAP. Un événement simple et ludique : une navigation de précision, une sensibilisation sur l’environnement et le patrimoine survolé, notre impact carbone…
Si le rallye avait été annulé du fait de précipitations et de vents violents prévus au sud de la côte atlantique, les festivités autour de Rochefort – aérodrome mixte en développement du fait de la saturation de La Rochelle – avaient été maintenues et nous avons, bien sûr, croisé sur la base des tas de militaires avec des étoiles plein les yeux, invités comme nous à admirer de très près un entraînement de la Patrouille de France : « Trois… Deux… On y va !… En dia… mant… Top !… La fu… mée… Top ! » Nul ne saurait jamais s’en lasser.
Pour en revenir à Denis et Guillaume, il s’agissait de deux pince-sans-rire, toujours drôles grâce à un sens de l’humour aiguisé. Ils m’ont dit adorer mes éditos parce que je soutenais l’aviation « jusqu’à la mauvaise foi ! ». J’en suis resté pantois. « À part cela, Aviation et Pilote est une revue de passion, bien écrite et avec de belles photos. Elle nous donne des buts techniques, des buts de pilotage, des buts de voyage grâce à ses récits de lecteurs, et, surtout, le sentiment qu’on n’est pas seuls ! »
Quid de la propriété d’un avion ? « En fait, un ami nous a dit un jour qu’acheter un avion était une belle connerie. Et qu’il était d’autant plus à l’aise pour en parler qu’il en possédait cinq ! » Cela ne s’invente pas… « Il nous a donc conseillés et, en 2020, nous avons acheté ce DR-250, réentoilé et repeint à ses couleurs de sortie d’usine de 1965. Ainsi, cet avion est superbe : quand on en descend, on le trouve beau ; quand on monte dedans, on le trouve toujours beau. De plus, il a une forte personnalité, ce qu’on adore. Avant, lorsqu’on se baladait avec un avion de l’aéro-club, on allait saluer les gens quand on se posait quelque part, maintenant, ce sont les gens qui viennent à nous, comme attirés par un aimant. En plus, il vole merveilleusement bien, il est particulièrement sobre et il a des performances supérieures à celles de plein d’avions qu’on trouve aujourd’hui sur le marché, alors nous voyageons le plus souvent possible à travers la France, et nous lançons des invitations car nous partageons évidemment notre passion, en bons prosélytes que nous sommes ! »
Sans penser un seul instant à la copine Greta et à l’avenir de la planète ? « Soyons sérieux, se donner bonne conscience en s’infligeant de petites contraintes ne sert à rien, sauf à dormir la conscience tranquille. Plutôt que de nous priver d’avion, de mégoter ici et là pour un résultat nul, Guillaume et moi préférons avoir un impact énergétique énorme grâce à notre activité professionnelle et aux solutions que nous déployons chaque jour. En contrepartie, eh bien, nous volons tout notre saoul ! »
Ce mois-ci, en dépit du climat, nous avons rencontré des gens heureux et, comme il se doit, c’étaient tous des pilotes !
Jacques CALLIES