Le hasard fait bien les choses. J’écrivais mon article de ce mois-ci, racontant le petit Jet privé qui fait la couverture, quand Emmanuel Davidson a appris par un réseau social quelconque qu’une vingtaine de « scientifiques en rébellion » s’étaient enchaînés aux grilles du siège parisien de Dassault, voulant ainsi dénoncer le rôle de l’aviation dans le réchauffement climatique et faire bannir les jets privés.
Je serais passé à côté de l’info car j’essaye de vivre sans les RS et je l’aurais regretté car j’ai ainsi découvert que le scientifique qui s’exprimait sur le sujet était un enseignant-chercheur en linguistique informatique, conscient de bénéficier d’une certaine stature du fait de sa position de chercheur : « Quand quelqu’un, qui est un universitaire ou un chercheur, vous dit que le changement climatique est bien réel et qu’il est causé par les activités humaines, il ne vous dit pas ça parce qu’il est payé par des lobbies ou parce que c’est un farfelu. »
Entre nous, ce chercheur, en linguistique informatique, je le rappelle, semble bénéficier d’un sens de l’humour particulièrement développé.
Évidemment, le sujet nous concerne, nous l’avons montré en vous racontant, bien avant que cela ne devienne un sujet sociétal, le « global warming », notamment à travers les études de l’ancien « US Navy pilot », notre cher ami le Dr Shauck, scientifique en rébellion avant l’heure, car il a commencé par analyser la pollution des turbines et réacteurs, au sol et en vol, avant de travailler sur les biofuels jusqu’à obtenir, il y a 30 ans, la certification FAA d’un moteur Lycoming de 100 cv fonctionnant à l’éthanol (ETBE).
J’ai appris à l’occasion de la manif devant Dassault « qu’un vol en jet privé polluait autant que ce qu’un humain devrait émettre en une année ». Sérieusement ? Justement, j’avais un point de comparaison, à savoir, en gros, les 100 USG consommés en une heure pour parcourir 600 km à quatre adultes : certes, nous avions pollué cinq fois plus qu’une grosse berline en allant cinq fois plus vite qu’elle – le prix de la performance – mais, en aucun cas, nous n’avions pollué autant qu’un être humain en une année !
Mais, peu importe, tout le monde s’en fiche, l’important n’est pas que cela soit vrai, mais que cela soit dit… Et repris.
Pas tout le monde, ai-je découvert, car je suis alors tombé sur le témoignage vidéo d’un écolo sympa, s’avouant bobo et fier de l’être, qui, après avoir investi 300 K€ dans des panneaux solaires, la récupération d’eau de pluie et divers équipements, regrettait que ses potes écolos nous racontent des bobards : « Je branche mon aspirateur et mon installation disjoncte. J’ai 1 kWh, il m’en faudrait 10, comme avant. Je ne vois pas comment on pourrait s’en sortir sans nos centrales nucléaires. »
Cette sincérité m’a fait du bien, comme de me retrouver le soir suivant dans les salons de l’Aéro-Club de France pour voir remettre la médaille de l’Aéronautique à Françoise Horiot en signe de remerciements de son action à travers Troyes Aviation, son entreprise, et, de façon globale, pour la cause des aviateurs via le Groupement des Industriels et Professionnels de l’Aviation Générale (GIPAG), syndicat qu’elle a présidé de 2007 jusqu’à ce début d’année. Et aussi, évidemment, comme pilote avion et défenderesse de la cause des femmes pilotes.
La dernière fois que j’ai raconté une remise de décoration, il s’agissait de celle de Jean-Marie Klinka et j’avais titré « Le festin de Jean-Marie », c’était une licence poétique faisant référence au film « Le festin de Babette » où grâce et vérité se rencontrent, justice et vérité s’embrassent. J’aurais pu titrer ainsi, cette fois encore, car celle, que je surnomme en privé la dame de fer, avait invité, entre autres, tous ceux avec lesquels elle avait croisé le fer pendant si longtemps. Et ils sont tous venus pour s’entendre rappeler combien il lui avait fallu se battre pour que l’aviation générale trouve une place suffisante entre aviation commerciale et aviation de loisirs ; pour que les textes réglementaires soient lisibles et compréhensibles par tous ; pour obtenir des délais de réponse « raisonnables » de la part de l’Administration ; pour que les manuels de vol soient ceux des constructeurs, en anglais, et à jour grâce à cela ; pour que les Supplemental Type Certificate (STC) soient reconnus par des accords bilatéraux entre FAA et EASA ; etc.
La sincérité punchy de Françoise, son envie de continuer l’action, comme de trouver un biais pour pallier la pénurie de mécaniciens avion à travers la reconnaissance des licences militaires ou encore que l’on crée l’immatriculation EU pour faciliter les mutations de propriété au sein de l’Europe – ce qui donnerait un sens de plus à l’EASA –, est exemplaire, surtout dans le contexte quelque peu décadent et fasciste du moment.
Sans conteste, il y a bien trois sortes d’hommes : les vivants, les morts et ceux qui vont dans les airs.
Bon Noël à tous, aviateurs et futurs aviateurs !
Jacques CALLIES