Blue skies and happy flying aurait mieux convenu pour débuter des vacances d’été que chacun est en droit d’espérer normales et heureuses, mais c’est l’expression la plus populaire depuis que les salariés du privé s’efforcent de reprendre leur respiration après avoir touché le fond du grand bain covidé. À force d’entendre au moins une fois par jour « c’est vraiment n’importe quoi », j’ai promis à mon dernier interlocuteur que je titrerai mon édito ainsi. Pas sexy, mais tant pis !
Il s’agissait de Bertrand Vilmer, le P-DG du Groupe Icare – créancier de l’école de pilotage Airways – qui s’efforce de sauver ses élèves, comme englués depuis bientôt deux mois dans l’espoir d’une reprise. Or, quand, « la mort dans l’âme » m’a-t-il dit, Bertrand Vilmer a finalement baissé les bras, puisque les conditions suspensives dans l’offre de reprise d’Airways après la liquidation étaient interdites – alors même qu’elles s’imposaient puisque son offre dépendait de promesses de don formulées en période électorale –, les conditions ont finalement été revues, un délai lui a été accordé pour reformuler une nouvelle offre de reprise avec conditions suspensives ! Ce « n’importe quoi ! » aura au moins permis à cette tête bien faite de planifier un avenir réaliste pour l’école, et ce délai va peut-être lui permettre trouver les 2,5 M€ qui manquent à son budget, et pourquoi pas auprès du GIFAS, m’at-il glissé : « En plus, je serais tellement honoré d’être sous sa surveillance ! » Croisons les doigts pour les 217 élèves, et tous les autres.
D’autres « n’importe quoi ! » sont les régulations qui sont imposées en France aux opérateurs et pilotes, des créneaux généralement de 2 heures qui perturbent arrivées et départs, génèrent de l’énervement et du stress, et donc des situations accidentogènes et non conformes. Comme nous l’écrit Jean-François Vassal, le gestionnaire de la plateforme d’Orléans : « Il est impensable que l’usager, l’opérateur aérien, le gestionnaire d’aéroport soient les victimes d’un problème d’effectifs de contrôleurs au moment où le monde de l’aérien est en grande difficulté et l’occupation de l’espace aérien est historiquement faible. Notre inquiétude est actuelle, mais aussi future pour l’anticipation de la reprise du trafic aérien. Je rappelle la maxime bien connue : gouverner, c’est prévoir. Ne rien prévoir, ce n’est pas gouverner, c’est courir à sa perte. »
Le problème est national, les mêmes événements nous ont été signalés du côté de Lille où un testeur et un élève, le premier en provenance des USA, l’autre d’Allemagne, se sont vus imposer un slot de deux heures, sans possibilité de négocier avec qui que ce soit.
Et aussi du côté de Lyon-Bron puisque le salon France Air Expo s’est vu affubler d’un NOTAM qui interdisait l’accès à la plateforme (un aéroport international ouvert à la CAP) aux VFR et réservait le stationnement aux avions basés et aux aéronefs de masse supérieure à 3,5 tonnes, avec handling obligatoire. En clair, les services de circulation aérienne et l’aéroport n’ont pas réussi à gérer une zone de parking temporaire. Au lieu de dire, on pourra accueillir X avions par jour, premier réservé, premier servi, la solution de facilité s’est imposée, au risque de condamner ce salon à mort. C’est vraiment n’importe quoi quand on sait que Friedrichshafen gère, lors de son salon AERO, sans interrompre son trafic commercial, des centaines d’arrivées et départs journaliers, avec des démonstrations en vol, et ceci avec une seule piste…
Autre grand n’importe quoi est la position de l’Autorité vis-à-vis de notre événement du 14 juillet à Poitiers, organisé dans le but de répondre astucieusement à Léonore Moncond’huy, la briseuse de rêves, en remettant l’aérodrome au cœur du débat écologique. Après deux mois de travail avec les gestionnaires, les aéro-clubs et l’Autorité, et une réponse positive de tous les acteurs de l’aérien sollicités, l’équipe organisatrice du Cercle Aéronautique du Parlement – dont nous sommes – est contrainte de communiquer ainsi : « Un grand merci pour votre réactivité et votre implication dans l’événement du 14 juillet à Poitiers. Face aux contraintes sanitaires encore en vigueur nous imposant un public trop réduit pour donner du sens à l’événement, nous avons décidé de le reporter au samedi 2 octobre 2021. Ce report est ainsi motivé par une audience plus large qui donnera un écho plus important à cette manifestation. Si la date change, nous espérons toujours pouvoir compter sur vous pour ce point de départ de la reconquête médiatique face à l’aviation bashing. »
En fait, si j’ai bien suivi la dernière réunion qui s’est tenue à Poitiers mi-juin, nous allions « peut-être et au dernier moment » être autorisés par la Préfecture à organiser cette journée portes ouvertes destinée à réconcilier les Poitevins avec leur aérodrome et l’aérien, mais à partir d’invitations individuelles, en nombre limité à 300 : le grand public, non identifiable, évidemment, était interdit par crainte d’infiltration et de débordement écolo !
C’est n’importe quoi !
Jacques CALLIES