Le vent de l’histoire est-il en train de tourner ? Toujours est-il que ce n’est plus seulement dans le microcosme de l’aéronautique que les poils se hérissent, mais bel et bien sur les plateaux des médias de masse, devant les énormités que les écologistes élus nous servent désormais.
Au départ, on y voyait commenter avec amusement ou inquiétude, c’était selon, les recommandations de gens ordinaires, tirés au sort à l’occasion de la Convention citoyenne pour le climat. Et même si, d’après certains politiques, il y avait un risque que le Président Macron ait les yeux de Chimène pour ces citoyens écologistes puisqu’il a impérativement besoin des verts pour être au second tour de la prochaine présidentielle, cela n’affolait que nous autres, aviateurs.
Heureusement, depuis quelques jours, les ténors écologistes s’y sont mis, se croyant assurés d’une impunité totale ou, au moins, d’un vent particulièrement portant, et aussi du fait que, plus c’est énorme, plus cela risque de passer. Tendez l’oreille, et vous entendrez Michel Audiard susurrer de sa tombe : « Les écolos, cela ose tout, c’est même à cela qu’on les reconnaît ». Je sais, c’est excessif, car nous sommes écolos nous aussi, mais convenablement, pas au point de détester l’homme et les activités humaines polluantes encore nécessaires à notre survie.
Qu’on me prive de 5G, de TikTok, de YouTube, de Twitter, de Facebook, de Messenger et de plein d’autres applis pratiques, dont je me passais très bien avant, puisque le virtuel représente 8 % des émissions globales de carbone, mais qu’on ne détruise pas l’aéronautique qui n’en représente que 3 % et assure une mission autrement plus essentielle en reliant les hommes en vrai, autrement vitale en matière d’emploi et de valeur ajoutée. Qu’on arrête de viser les cibles faciles, sans reconnaître que notre industrie, tous secteurs confondus, a entamé sa transition écologique bien avant que cela devienne un impératif civique.
Cette semaine, en bon prosélyte, j’ai raconté à qui voulait bien m’entendre que notre équipe s’était rendue, en Mooney, le lundi à Bordeaux, le mardi à Vysoké Myto, en République tchèque, le mercredi à Wiener Neustadt, en Autriche, de retour le soir même à Melun. Voyage impossible à réaliser dans le même temps avec les liaisons terrestres, ferroviaires et aériennes conventionnelles, le tout avec un bilan carbone bien inférieur à celui que nous aurions signé en prenant l’avion de ligne, le train et le taxi. Voilà à quoi servent les petits avions, n’ai-je eu de cesse de répéter, en n’insistant surtout pas sur le plaisir de piloter afin de ne pas être catalogué de petit-bourgeois contre-révolutionnaire et de risquer la décapitation.
Dernièrement, le départ de Patrick Gandil, notre directeur de la DGAC, nous a laissé un goût amer en bouche. Il avait l’intelligence du cœur, la volonté de faire progresser l’aérien, et aussi la qualité d’être pilote, d’aimer les avions, de penser que les privés étaient capables de voler aux instruments aussi bien que les professionnels, de pratiquer l’hydraviation et le vol en montagne, etc. Bref, pendant les treize années de son mandat, il a fait progresser l’aviation, la sécurité, le dialogue entre Administration et usagers. Un bilan que tous s’accordent à évaluer comme plus que positif.
Pourtant, j’ai appris de l’un de ses collaborateurs, qu’en interne, on ne donnait pas cher de l’avenir de la Mission Aviation Légère, Générale et Hélicoptère (MALGH). Pour quelles raisons ? Damien Cazé, son successeur, ferait-il peur sous prétexte qu’il est proche d’Édouard Philippe et de Jean Castex ? Est-il est trop brillant et diplômé pour comprendre qu’écologie peut rimer avec aéronautique, une rime qui, au fil du temps et des progrès technologiques, va devenir de plus en plus riche ? Nous prendrons le temps d’apprendre à le connaître mais, dans tous les cas, il faut entamer un mouvement contre-révolutionnaire, combattre les courants de pensée écolo liberticides actuels, et nous engager vraiment.
Mes états d’âme du mois dernier sur la nuit aéronautique toute proche m’ont valu quelques courriels et coups de fil d’encouragements, mais personne, à part Jacques Clostermann, qui est au moins favorable à une discussion, ne se sent suffisamment influent et charismatique pour assumer la tête d’un parti, compte tenu de la violence contextuelle.
Aussi, pourrions-nous commencer par un projet fondateur simple, un Think-Tank, un laboratoire d’idées ? Bourré d’intelligence pratique, se basant sur des faits et statistiques avérés et sans faire appel à un tirage sort… Un ami m’en a déjà suggéré le nom : Greta pour Groupement de réflexion d’experts en transition aéronautique. En mémoire de celle par qui tout est arrivé.
Voilà un acronyme prometteur, ne trouvez-vous pas ?
Jacques CALLIES