Parfois, on est désolé d’avoir raison. C’est le cas ce mois-ci après avoir guetté les réactions après la parution de la page de publicité que s’est offerte l’EBAA* France dans le Journal du Dimanche (JDD), parfaitement documentée : en fait, il n’y a eu aucune réaction.
Cette lettre ouverte à Manuel Valls, relative à l’exclusion imminente de 13 aéroports de province comme points de passage frontalier devait « forcément » obliger le gouvernement à faire marche arrière, ainsi que nous l’avait expliqué, la rage au coeur, Dannys Famin, propriétaire d’UNIJET et président de l’EBAA France : « Les députés n’ont rien d’autre à lire le week-end, ils réagiront forcément ! »
« Autant pisser dans un violon ! », lui avais-je répondu irrespectueusement, sachant par expérience que la disparition progressive des points de passage frontaliers (PPF), pourtant vitaux à la circulation des avions, donc à l’activité globale, donc à l’emploi, n’intéressait pas le gouvernement puisque nous dénonçons nous aussi l’absurdité des premières fermetures depuis 4 ans au moins.
D’abord, nous avons rédigé un document de 32 pages « Aviation générale et passage de frontières en France », indiquant les solutions simples à mettre en œuvre pour protéger nos frontières sans pénaliser l’activité, à l’intention du député de l’opposition Yves Fromion, président d’un groupe d’études sur l’aviation générale, qui a ensuite posé une question écrite au gouvernement. Sans résultat.
Ensuite, nous avons remis ce document au député Bruno Le Roux, président du groupe socialiste à l’Assemblée Nationale, qui nous a promis de plaider ce dossier auprès de Bercy. Sans résultat.
Puis notre dossier a été confié à Alexandre Couvelaire, ancien président d’Euralair, après qu’il a été chargé par le ministère de l’Intérieur de rédiger un memo sur l’impact de la disparition de la Douane à Toussus et l’incohérence de cette décision. Sans résultat.
Enfin, nous nous sommes rendus deux fois à Bruxelles pour y dénoncer l’incohérence européenne en matière d’aviation générale. Sans résultat.
Mais vous ? Qu’en pensez-vous ? N’êtes-vous pas inquiet à votre tour, même si vous ne voyagez pas hors de l’espace Schengen ? Visiblement pas puisque la pétition en ligne qui accompagnait la publicité de Dannys Famin, relayée par tous les sites web aéronautiques et organisations concernées, n’a été signée que 1 884 fois au moment où j’écris ces lignes. Un résultat pitoyable puisque nous sommes au moins 57 000 pilotes en activité et 250 000 acteurs du secteur.
Le message nous paraissait pourtant tellement important !
Comment dans ce cas reprocher aux politiques leur démagogie et leur clientélisme si nous-même ne percevons pas dans cette banale affaire de PPF un manque de vision tragique, symptomatique de la méconnaissance du monde actuel. Arrêtons de rêver, plus rien n’est acquis à jamais, les lignes bougent sans cesse, les équilibres sont fragiles…
La protection des 2,054 milliards d’euros de production cumulée pour 4,140 milliards d’euros d’impact économique total et des 21 000 emplois de l’aviation générale méritait un effort de tous.
Par chance, l’époque s’y prête ! Les élections présidentielles approchent, nous devons plus que jamais mettre à profit le conseil que nous avait prodigué l’honorable membre du Parlement européen Knut Fleckenstein : « La période de réélection, c’est le seul moment pour nous mettre la pression ! »
Exigeons que les secteurs de notre économie, qui fonctionnent encore à peu près, soient protégés, encouragés et leurs acteurs entendus des élites. Redonnons du civisme à notre prochain gouvernement ! Aux urnes !
Après les élections, il sera trop tard.